Nathalie Piégay

Résumé

L’érudition, considérée comme un savoir savant, privilégiant ses objets obsolètes ou spécialisés, ou comme une pratique philologique des textes, a depuis longtemps été l’objet d’une critique forte. Pour autant elle est restée vivace dans l’imaginaire des écrivains. Aujourd’hui, elle est profondément modifiée par l’usage d’Internet. Mais le rapport au texte, la conception humaniste et la conception mémorielle de l’érudition sont remis en cause. Après une relation humaniste puis mélancolique ou mémorielle de l’érudition, apparaît un usage postmoderne : le savoir est investi par jeu, en dépit parfois du partage entre le vrai et le faux, en manipulant les traces toujours plus abondantes constante du passé.

1pratiques savantespratique artistiquelittérature typologie des savoirsdisciplinesdivisions historiques des savoirshumanisme acteurs de savoirstatutéruditÀ la suite des travaux que j’avais entrepris il y a une quinzaine d’années sur l’érudition imaginaire, je voudrais me demander comment le développement des bibliothèques et archives numériques, et plus généralement des documents numérisés et du Net, ont pu modifier l’imaginaire que nous avons de l’érudition et notre rapport à la connaissance, que l’on en fasse un usage savant ou artistique, critique ou inventif. Je ferai l’hypothèse que l’écriture littéraire, comme l’écriture de l’histoire telle que l’a analysée Michel de Certeau, est tributaire de l’érudition (en tant qu’elle en est une technique) et que celle-ci, comme l’écriture de l’histoire elle-même, est déterminée sur le plan social (qui fait l’histoire ? quels hommes ?), matériel (quels moyens, quelles techniques, quel support, aujourd’hui quels médias ?) et institutionnel (quel rapport aux pouvoirs et à des institutions comme les bibliothèques les archives ?). Je tenterai ainsi de montrer comment on est passé d’un usage savant et humaniste (dans la tradition religieuse) de l’érudition à un usage fantastique (selon l’expression de Foucault dans « La bibliothèque fantastique1 ») puis à un régime mémoriel puis postmoderne.

2pratiques savantespratique intellectuellecritique typologie des savoirsdisciplinessciences humaines et socialessciences des textesRappelons d’abord que l’érudition telle qu’on l’a pratiquée d’un point de vue littéraire est une méthode de connaissance basée sur l’étude des textes, de leurs leçons et variantes, qui vise à constituer un savoir objectivé par un appareil critique, des notes, des index, des leçons philologiques. C’est pourquoi on peut considérer comme érudite une création qui se fonde sur cette méthode d’investigation, lui emprunte ses dispositifs ou la développe et la représente dans une fiction, un film, une installation, un texte poétique.

3pratiques savantespratique artistiquelittérature pratiques savantespratique intellectuelleimaginationPlus précisément encore, l’érudition caractérise un usage savant du savoir ou un savoir savant, privilégiant les savoirs (ou les textes) obsolètes, menacés de désuétude, les segments minuscules d’un savoir particulier et leur investigation minutieuse. L’érudition a donc une double caractéristique : d’une part c’est un savoir marginalisé ou ultra spécifique ; d’autre part c’est un savoir en voie d’obsolescence ou tombé dans l’oubli. C’est ainsi que Judith Schlanger peut définir l’érudition comme le devenir littéraire des objets de pensée ou des objets littéraires : ils seraient réappropriés, selon elle, précisément lorsqu’ils sont déjà oubliés2. C’est alors qu’ils sont réinvestis par l’imagination ou la mémoire littéraire.

4L’érudition, en effet, et je vais me permettre de résumer certaines des thèses que j’avais avancées3, a été l’objet d’une critique très vive, dès lors qu’on a pu la considérer comme caractéristique d’un humanisme religieux.

5construction des savoirstraditionTrois motifs principaux sont la cause de son discrédit. Le premier est sa nature anti-spéculative ou anti-théorique : les Lumières en particulier, puis tout mouvement de pensée qui a favorisé la spéculation plus que l’observation, l’invention théorique plus que la tradition philologique, ont récusé l’érudition. Signe de bêtise, de soumission, elle serait opposée à la liberté de la théorie dégagée d’une tradition livresque. On peut voir dans la Nouvelle Critique, puis dans la théorie du texte ou l’invention de l’intertextualité une expression positive de ce discrédit de l’érudition : on invente une pensée du texte et un rapport à la mémoire qui se détache précisément de ce modèle d’exégèse.

6pratiques savantespratique intellectuelleimaginationLe deuxième motif est l’opposition de l’érudition à l’imagination (et c’est encore un motif romantique) : là où on ne sait qu’imaginer, où l’esprit est sec et désincarné, l’érudition pallie le manque de talent. La lecture en sera ennuyeuse, rébarbative. Tout ce qui valorise en outre l’originalité et le génie romantique ne peut que dévaloriser l’érudition : un poème de Victor Hugo, L’Âne 4, me semble représentatif entre tous du discrédit romantique de l’érudition. De même, l’avant-garde, et tout ce qui relève d’une promotion du non savoir, engage nécessairement un rejet de l’érudition.

7Le troisième motif du discrédit de l’érudition est le suivant : elle serait sollicitée au défaut de l’expérience. Faute de pouvoir se référer à ce que l’on sait en propre, à ce que l’on a observé ou découvert par soi-même, on trouve refuge dans les livres des autres et on pallie la peur de l’expérience par la lecture ou la citation. C’est le sens de la critique nietzschéenne de l’érudition, qui va jusqu’à considérer que trop de lectures tuent la pensée et la vie :

acteurs de savoirstatutsavantNous ne sommes pas de ceux qui ne pensent qu’au sein des livres et dont l’idée attend pour naître les impulsions de l’imprimé ; notre habitude de penser au grand air, en marchant, sautant, montant, dansant, et de préférence sur les montagnes solitaires ou sur l’extrême bord de la mer, là où les chemins se font méditatifs eux-mêmes. […] Dans le livre d’un savant on trouve presque toujours quelque chose d’oppressé qui oppresse ; on y rencontre fatalement, à un tournant ou à un autre, le « spécialiste », avec son zèle, son sérieux, son courroux, sa pompeuse opinion du recoin où il rêvasse, assis sur son derrière ; sa bosse enfin – car tout spécialiste a la sienne. Le livre d’un savant reflète toujours une âme bossue […]5.

8En outre, l’érudition est considérée comme antinomique de toute pratique d’avant-garde : la fameuse critique par Breton de l’inédit de Rimbaud, La chasse spirituelle, dont il montre qu’il est un apocryphe – discréditant au passage la méthode érudite –, vaut comme plaidoyer pour la connaissance libre, a-livresque, émotive, énigmatique, contre le respect de la tradition. Si je rappelle ces points, ce n’est pas tant pour tracer une histoire de l’anti-érudition que pour souligner à quoi elle est opposée, de façon structurelle et récurrente : la puissance théorique opposée à l’accumulation de savoirs ; l’invention individuelle et l’imagination ; l’expérience vécue ; l’innovation avant-gardiste qui mise sur l’oubli et la rupture.

9acteurs de savoirsexe et genreL’érudition, dans cette perspective, a pu être considérée comme un poison, qui finit par tuer (surtout les femmes) et faire chavirer les limites entre la mort et la vie. Dans plusieurs nouvelles d’Edgar Poe, des femmes érudites se meurent de trop savoir, entraînent dans la mort leur amant. Elles ont un goût trop prononcé pour l’étude qui les place en bordure de l’humanité, comme le montrent « Morella » et « Ligeia ».

Il faudrait s’attarder plus longuement sur le fait qu’il s’agit de deux femmes savantes versées dans la philosophie ou les sciences occultes. Elles sont représentatives de la dangerosité du savoir savant pour les femmes – signe probant de la collusion du savoir et du pouvoir : celui qu’elles pourraient en tirer les tuent et tuent leur descendance. L’érudition est, pour les femmes, risquée, dans l’imaginaire de Poe comme dans celui de son époque, et peut-être encore dans la nôtre. Ces deux savantes, en effet, et c’est passionnant pour notre sujet, deviennent des spectres. La première, Ligeia, meurt, puis son mari, qui est aussi le narrateur, épouse Lady Rowena, mais Lady Ligeia ne cesse de le hanter. Quand Lady Rowena à son tour meurt, il la veille et sur son lit de mort, ressuscite son cadavre – en l’espèce c’est Ligeia qui revient, son amour perdu, dont les cheveux noirs flottent dans la chambre. Car l’érudition de Ligeia :

construction des savoirslangage et savoirslangue classique acteurs de savoirsexe et genrefémininétait immense, telle que jamais je n’en vis de pareille dans une femme. Elle connaissait à fond les langues classiques, et aussi loin que s’étendaient mes propres connaissances dans les langues modernes de l’Europe, je ne l’ai jamais prise en faute. Véritablement, sur n’importe quel thème de l’érudition académique, si vantée, si admirée, uniquement à cause qu’elle est plus abstruse, ai-je jamais trouvé Ligeia en faute ?6.

10typologie des savoirsobjets d’étudetempspassé acteurs de savoirstatutéruditMorella, autre femme érudite, meurt en laissant une petite fille à son père ; lorsqu’il la baptise et prononce devant elle le prénom de sa mère qu’il veut lui donner, elle meurt à son tour. Quand il la transporte dans son tombeau, il n’y a plus de trace de la première Morella7. La dimension spectrale des deux femmes est clairement reliée à leur rapport érudit aux livres : le savoir est ce qui les hante comme leur mort continuera à hanter l’homme qui les aimait. Le rapport à l’érudition est mélancolique au sens fort du terme8. Parce qu’elles ont un rapport trop savant et trop puissant au passé, Ligeia et Morella remettent en cause la limite entre la mort et la vie. Ce que j’appellerai le syndrome de Ligeia et de Morella est lié au devenir spectral du savant lui-même.

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12construction des savoirsépistémologiefictionLa dimension extraordinaire, fantastique au sens propre, de ces deux nouvelles de Poe en dit long sur le rapport au savoir : il désincarne et perturbe les limites entre la mort et la vie – entre les identités. Son pouvoir de hantise est donc immense. Pour autant, alors même que les pratiques érudites perdent de leur importance dans l’historiographie comme dans les études de critiques littéraires, alors même qu’elles sont l’objet de satire et de dédain, elles n’ont cessé d’être sollicitées par l’invention. L’érudition est alors imaginaire, au sens où elle prend place dans un monde imaginé et fictif, dans lequel évoluent des personnages de savants, étranges et mélancoliques, comme ceux des récits et romans de W. G. Sebald. Dans le roman de Sebald, le personnage éponyme, Austerlitz, spécialiste érudit de l’architecture militaire, projette dans une sorte d’irréalité tout ce qui l’entoure : la dimension spectrale provient du savoir excessif du personnage qui le protège contre une perte originelle et une angoisse de la disparition, celle de ses propres traces9. Ici aussi, il y a une mélancolie fondamentale de l’érudition, sorte de « prothèse du dedans », pour reprendre l’expression de Derrida dans Mal d’archive 10. Elle fait écran à la force de vivre, à la perte de l’identité, à la hantise de la mémoire. Dans la deuxième moitié du xx e siècle, plus l’érudition est discréditée par l’épistémologie (théorie du texte, historiographie moderne ; pratiques de l’enquête), plus elle est réduite à une accumulation de matériaux préalables à l’historiographie dont elle ne serait qu’un moyen, une technique, plus fortement elle se trouve réinvestie par l’imagination, en particulier la fiction.

13Le cas de Sebald noue la question du savoir et celle de la mémoire, montrant comment l’érudition est placée sous le double signe de l’excès : trop de savoir, trop précis, trop rare, trop ancien. Elle est d’autant plus sollicitée qu’elle contre un vide, un manque : perte de sens, de mémoire, d’identité. Ses textes sont exemplaires du paradigme mémoriel de l’érudition.

14espaces savantslieubibliothèque typologie des savoirsdisciplinesdivisions historiques des savoirshumanismeCette dimension excessive de l’érudition, bien notée par Foucault dans l’article « La Bibliothèque fantastique » qu’il a consacré à Flaubert (en particulier à « la Tentation de Saint Antoine »), est caractéristique d’un usage qu’on pourrait dire non humaniste mais fantastique de l’érudition : il ne s’agit pas de constituer un savoir qui renforce l’idée d’un Homme raisonnable, rationnel, formant une communauté humaine tendue vers un idéal de connaissance et de progrès, mais un savoir vacillant, bordé par la folie ou le délire. Le moment Flaubert serait ainsi celui du point de bascule d’un régime humaniste à un régime fantastique. Le savant est alors objet de satire : le personnage de Kien d’Autodafé de Canetti, passant son temps dans sa bibliothèque ou dans les listes de livres qu’il demande à lire et qui le coupent de tout autre contact avec les autres, n’est pas présenté comme un humaniste mais au contraire comme une figure de la déraison11. La dévalorisation ou la satire romanesque du personnage d’érudit est un symptôme intéressant du discrédit jeté sur l’érudition en tant que méthode d’investigation des textes et de production d’un savoir.

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16acteurs de savoirstatutbénédictin construction des savoirstraditioncumulativité inscription des savoirslivrenoteQuelque dévalorisée qu’elle soit, l’érudition n’a pas disparu et son spectre rôde sur l’invention contemporaine. Toute une partie, et non la moindre, de l’invention narrative puise en effet dans des textes érudits des personnages ou des anecdotes, voire des informations ou des données lexicales qui valent comme autant de ferment, et qui parfois s’exposent dans les notes, des listes ou appareils critiques qui trouvent leur place dans le récit lui-même.

Pierre Michon, par exemple, parle à propos des notes qu’il accumule avant d’écrire de la disproportion qu’il y a entre ce matériau digne d’un bénédictin et le résultat parfois minuscule qu’il produit : à la manière de Flaubert, il y a une disproportion entre tout ce qu’il faut lire et les deux mots qui peuvent réchapper des monceaux lus, dans la fable inventée12. Dans Abbés il met sur le même plan les textes inventés ou apocryphes et les textes attestés, l’érudition signifiant non pas un rapport positif au savoir (objet ou non de satire) mais une démarche un peu délirante ou marginale et excentrique investissant un objet livresque avec une passion, une méthode, une pulsion parfois démesurée13.

17inscription des savoirsgenre éditorialcatalogueDans Les Anneaux de Saturne, Sebald cite Thomas Browne, et ses écrits posthumes variés, « un catalogue de livres remarquables, antiquités et autres objets singuliers » publié sous le titre Musaeum Clausum ou Bibliotheca Abscondita. Elle a la particularité de constituer un trésor purement imaginaire, qui contient néanmoins :

typologie des savoirsdisciplinessciences formelles et expérimentalessciences de la vie et de l’environnementsciences de la vie par type d’organismesbotaniqueUn traité du roi Salomon sur les ombres de la pensée – document issu d’un fonds ayant appartenu aux ducs de Bavière –, une correspondance en hébreu entre Molinea de Sedan et Maria Schurman d’Utrecht, les deux femmes les plus érudites du xvii e siècle, ainsi qu’un répertoire de botanique sous-marine comprenant la description et la représentation détaillées de tout ce qui pousse sur les massifs rocheux et dans les vallées au fond des mers, algues, coraux, fougères d’eau, mais aussi de phénomènes que personne, à ce jour, n’a eu le loisir d’observer, halliers flottants traversés de courants chauds, îles végétales poussées par les alizés de continent en continent14.

18Pascal Quignard, lui, invente un livre fait de fragments apocryphes et érudits, Les tablettes de buis d’Apronenia Avitia, tout à fait emblématique du goût de Quignard pour les restes, les pièces déchues des civilisations, les mots oubliés, les textes perdus ce qu’il appelle les sordida. Il ne s’agit pas de reconstituer une époque à partir de ce que les historiens ou archéologues en ont exhumé mais d’inventer ce qu’elle aurait pu produire, la fiction n’étant jamais qu’une glose. La perspective d’invention se dégage de l’humanisme15.

19construction des savoirsépistémologiefiction construction des savoirsépistémologieanormalitéIl en est de même lorsque l’érudition réinvestit des savoirs des savoirs idiots. Ainsi, dans les livres de Pierre Senges, le savoir n’est plus ce qui assure maîtrise et contrôle mais ce qui rend fou ou fait basculer les limites entre vrai et inventé, mort et vie, réel et virtuel. L’érudition n’est plus seulement un ferment de l’imagination comme l’avait vu Foucault, mais ce qui déstabilise la réalité, devenue virtuelle (et non fantastique). Elle est aussi une ressource d’invention formelle, le texte rivalisant avec le métatexte, saturant de discours et de métadiscours, voire de documents, l’espace même de la fiction : fétichisme du savoir, frénésie du détail, disproportion entre l’énergie ou le désir mis en œuvre et l’enjeu de la question étudiée ; l’érudition est folle, pure fantaisie qui remet en cause les limites de la réalité, et se coupe de la satire du savant pédant et cuistre comme de la dévaluation des savoirs savants au nom d’un usage libre et démocratique de l’intelligence. Pierre Senges, dans les Fragments de Lichtenberg, met ainsi en scène le personnage historique de Lichtenberg, professeur de physique à l’université de Göttingen, contemporain de Swift et de Goethe, bossu et acharné à écrire un vaste roman dont on n’a que des fragments, poursuivant une hypothèse scientifique farfelue : le roman de Senges se bâtit sur les gloses que des chercheurs érudits et à leur tour un peu fous développent sur ce roman détruit : l’érudition a affaire à des ruines, à des fanatiques de l’écriture et de la réflexion, sans pour autant produire autre chose que des livres fantomatiques. Le roman tourne en dérision la glose et l’exégèse, mais place bien l’érudition au centre de sa démarche.

20construction des savoirstraditioninventionDans un autre de ses livres Senges explore la théorie d’un homme, Guevara, qui réfute que Christophe Colomb ait inventé l’Amérique :

Si l’on décide de se passer de la figure de Guevara (un évêque ? un confesseur et un donneur de leçons ? une vieille barbe), si l’on décide que Guevara est un nom aussi creux pour l’instant et énigmatique que celui du Pseudo-Denys l’Aréopagite, on peut aussitôt s’offrir le plaisir de puiser dans la liste des auteurs suspects, en activité entre 1500 et 1530, et dépourvus d’alibis sérieux. Et par bonheur le catalogue est long, puisque c’est une époque de graphomanes, d’érudits omnivores et omnipotents, de compilateurs, d’encyclopédistes, d’hommes curieux et de bibliophiles : qui veut les énumérer tous doit avoir une voix incassable et des poumons de bronze. Pour Conrad Gesner (Bibliotheca Universalis), l’auteur de la Réfutation est Laonicus Chalcochondyle, polygraphe grec qui (d’après Burton) attribuait aux Anglais des mœurs babyloniennes ; pour Guillaume Postel (De Orbis terrae concordia) il s’agit du pape Pie IV ; d’après Pierre Bayle (Pensées sur la comète, 1680), il faudrait plutôt regarder du côté de Willibald Pirckheimer, sénateur de Charles Quint et géographe, qui ne quittait jamais son lit, à cause de ses crises de goutte ; selon Athanasius Kircher (jésuite savant et parfois absurde, inventeur de la langue magique et décodeur raté des hiéroglyphes), il s’agit de Léon l’Hébreu, et pour Sor Juana Ines de la Cruz, qui se trompe évidemment, il s’agit d’Athanasius Kircher ; Thomas Browne (Pseudodoxia Epidemica) propose le nom de Ludovico Ricchieri, selon qui la Gorgone n’était qu’une femme d’une beauté stupéfiante ; John Toland, champion de la vérité selon sa propre épitaphe, prétend dans De l’origine et de la force des préjugés qu’il s’agit de Pietro Bembo, ce cardinal qui avait refusé d’épouser sa maîtresse Faustina afin de conserver ses bénéfices ecclésiastiques (il entretenait dans le même temps, à ce qu’il paraît, une liaison platonique avec Lucrèce Borgia) ; pour Giabattista Vico (Scienza Nova), il s’agit de Johann Tritheim, le créateur du mot stéganographie (mort cependant vers 1516) ; pour Balthazar Bekker (son Monde enchanté soutient qu’en vérité les diables ne sont que des hommes pervers, et les anges des personnes vertueuses), il s’agit d’un certain Lilio, chanoine de Saint-Jean-de-Latran, et dernier partisan d’une vision aplatie du monde ; pour Christian Thomasius, il s’agit de Gregor Reisch, qui dans la Margarita Philosophica de 1503 fait de l’hémisphère austral un immense océan ; enfin, pour saint Évremond (il ne voulait pas perdre une occasion de parler), l’auteur de la Réfutation majeure ne saurait être que Pietro Pomponazzi, le Padouan, selon qui (De naturalium effectuum admirandorum causis seu de incantationibus liber, 1556), les miracles sont un produit de l’imagination humaine. (L’idée d’attribuer la Réfutation à Garcia Rodriguez de Montalvo, auteur de L’Amadis et des Exploits d’Esplandián n’est venue à personne – c’est dommage : on lit dans l’Esplandián le nom de la Californie, écrit pour la première fois trente ans avant sa découverte en 1542)16.

21inscription des savoirsvisualisationvisualisation de l’informationlisteBel exemple d’érudition : liste, énumération de titres tombés dans l’oubli, spectres d’auteurs qui transforment C. Colomb en fantôme et l’Amérique, non pas découverte par celui-ci, mais, selon Antonio de Guevara, inexistante – la réfutation est peut-être l’autre nom du négationnisme, un négationnisme extravagant et innocent : le réel n’est que la somme des noms qui en propagent l’inexistence. La frontière entre la réalité et la fiction est sans cesse remise en cause.

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23acteurs de savoirémotioncuriosité acteurs de savoirstatutérudit typologie des savoirsdisciplinessciences humaines et socialeshistoire Michel de Certeau avait noté dans L’Écriture de l’histoire que l’érudition, dont le développement, d’abord lié à l’activité juridique, est « expansionniste et conquérante », « productrice et reproductrice ». C’est que « l’érudit veut totaliser les innombrables raretés qu’amènent chez lui les trajectoires indéfinies de sa curiosité et donc inventer des langages qui en assurent la compréhension ». Et il ajoute :

pratiques savantespratique lettréedéchiffrementIl est habité par le rêve d’une taxinomie totalisante et par la volonté de créer des instruments universels proportionnés à cette passion de l’exhaustif. Par l’intermédiaire du chiffre, central dans cet « art du déchiffrage », il y a des homologies entre l’érudition et les mathématiques17.

24L’usage contemporain, en particulier dans la fiction, fait le deuil de cette exhaustivité en ajoutant là où il n’y a pas plutôt qu’en explorant, pour le conserver et le maîtriser, ce qui est déjà. Elle liquide, dilapide, au moins autant qu’elle thésaurise. Elle ne discrimine plus.

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26construction des savoirstraditionmémoire construction des savoirstraditionarchivage matérialité des savoirssupportinfrastructure numériqueInternetMais en quoi le développement d’Internet – des modes d’archivages, de conservation, de consultation ont-ils pu, et en quel sens, modifier ce rapport à l’érudition ?

27D’abord il faut rappeler que l’érudition est dans son sens moderne considérée comme un savoir rare, obsolète, en voie de disparition ou déjà disparu. Il est donc investi par un sujet qui a une curiosité particulière et qui l’isole dans sa propre mémoire à l’intérieur d’une mémoire qui menace de l’engloutir et de l’oublier. Or Internet modifie les règles de cette exhumation : prothèse mémorielle, mémoire externe de l’individu, le Net retrouve des choses qu’on ne savait même pas avoir perdues, d’une part parce que les moteurs de recherche ont un pouvoir plus grand que n’importe quelle mémoire individuelle, sans en avoir les angles morts ni les refoulements, d’autre part parce que le périmètre même du champ investigué (savoirs et mémoires) s’est considérablement élargi. La mémoire constituée par le Net et qu’on interroge avec un moteur de recherche modifie profondément la relation entre mémoire et oubli obligeant à réarticuler la mémoire objective (celle de notre disque dur, des textes numérisés, etc.) et la mémoire subjective (celle que nous avons des textes et des faits).

28En raison de la déhiérarchisation des objets conservés et numérisés, le rare, l’excentrique, qui définissaient la particularité de l’érudition, deviennent des catégories problématiques. On peut tout retrouver – et tout consulter – aussi bien un article secondaire, une archive rare, une note quasi confidentielle.

29Si l’on suppose donc que l’érudition est ce qui est exhumé d’une mémoire en train de sombrer dans l’oubli, les modifications des conditions de l’effacement et de l’oubli entraînées par le numérique, l’érudition se modifie aussi.

30inscription des savoirsgenre éditorialencyclopédie matérialité des savoirsinstrumentterminal informatiqueordinateur personnel Michel de Certeau à propos de l’avènement du computer, Derrida à propos de la trace, et Lyotard analysant l’état du savoir, avaient chacun pris la mesure de ce que l’on n’appelait pas encore le numérique qui allait entraîner des modifications profondes dans notre rapport au savoir et à la mémoire. Lyotard, dans La condition postmoderne, en 1979, montrait l’émergence de l’expertise et la modification radicale qu’elle entraînerait dans notre relation à l’encyclopédie ; Derrida, dans Mal d’archive, tirait les conséquences de l’externalisation de notre mémoire. Michel de Certeau quant à lui, parce qu’il avait analysé la manière dont le passage de l’érudition à l’archivistique avait été une modification profonde de l’historiographie, pouvait entrevoir comment le numérique redistribuerait les trois facteurs dont la combinaison détermine toujours l’écriture de l’histoire : un groupe (les érudits ; puis les archivistes et les historiens), des lieux (les bibliothèques) et des pratiques (copiage, impression, communication, classements). Aujourd’hui, la dématérialisation des archives et ce que l’on pourrait appeler sa délocalisation comme la modification des pratiques (communication, classement, copiage, archivage, etc) et la remise en cause du « groupe » (avènement du crowdsourcing, web 2.0) avec le numérique constituent bien les bases d’une modification profonde de l’écriture de l’histoire et de notre rapport au savoir et à la mémoire.

31La fiction répercute ces modifications non seulement parce qu’elle reflète en termes de représentations les usages nouveaux de l’érudition et de la crise qu’elle traverse, mais aussi parce qu’elle est au croisement des mutations du rapport au savoir et à la mémoire, et enfin parce qu’elle est le lieu des interrogations possibles sur les impensés de cette crise. C’est sans doute pourquoi très nombreux sont les textes, essais ou fictions, qui mentionnent le rôle que joue Internet dans la documentation, le rapport au savoir ou à la mémoire.

32C’est le premier point que je voudrais souligner. Ce qui m’importe n’est pas que les romanciers ou autobiographes fassent un retour sur leur pratique d’écriture, signe d’une modernité à laquelle nous sommes habitués, mais qu’ils mettent en avant les ressources numériques en tant qu’elles ont modifié leurs pratiques. Ces ressources sont de deux ordres : des ressources documentaires à des fins de réalisme et des ressources mémorielles.

33matérialité des savoirssupportinfrastructure numériqueInternet inscription des savoirslivreLes premières permettent au romancier ou au narrateur d’étayer l’exactitude de ce qu’il raconte ou représente : un nom de lieu, une date, la configuration d’un espace, le résumé d’une anecdote historique. Tout peut être retrouvé sur le Net qui configure la réalité – peut-être celle-ci n’est-elle plus le réseau de signes sociaux par lesquels on se la représente mais l’ensemble de ses représentations ou indices numériques que le web sous toutes ses formes conserve. Le tour documentaire du récit fictionnel ou exofictionnel procède de cela : tout est vérifiable, d’un clic sur Google. Le rapport à la réalité et à la vérité se modifie autant que le rapport historien ou mémoriel à la mémoire. Mais il y a plus : c’est à cette mémoire impersonnelle que le romancier puise pour raconter. Un exemple de ce tournant numérique pourrait être le livre de Diane Meur, La Carte des Mendelssohn 18. D’une part, Diane Meur, racontant l’histoire de la famille Mendelssohn, ne dissimule pas les ressources que lui fournit Internet. D’autre part elle fonde son récit sur un imaginaire du réseau qui est en homologie avec le Net, qui, au désir encyclopédique exhaustif substitue des savoirs réticulaires. Diane Meur met sur le même plan les livres et les bibliothèques d’une part, les archives d’autre part, et enfin la documentation qu’elle consulte sur le Net :

Ah, ce Joseph, il a m’a donné du mal. De tout ce que j’avais lu dans la biographie de son frère, je n’avais retiré de lui qu’une image lisse, monolithique, le type de personnalité à l’intérieur de laquelle une romancière serait incapable de se glisser, faute de faille, pour voir avec ses yeux. Jusqu’au bout, c’était le parcours irréprochable d’un homme prenant toujours la bonne décision pour parfaire l’œuvre de sa vie : son empire banquier19.

34La narratrice voit dans cette masse documentaire un défi pour l’écriture romanesque :

Toutefois (me suis-je dit par la suite), si Thomas Mann avait eu pour point de départ non pas les quelques pages de la Genèse, chapitres 37-49, mais des kilogrammes de documents, portraits, livres de comptes, extraits d’état civil, correspondances bihebdomadaires entre Jacob, ses deux épouses, ses deux concubines et ses douze fils Ruben, Siméon, Lévi, Juda, Issacar, Zébulon, Dan, Naphtali, Gad, Asr, Joseph et Benjamin ; des biographies consacrées à tel d’entre eux ou de leurs descendants, et des articles, accessibles dans n’importe quelle bibliothèque universitaire, sur des sujets aussi pointus que – mettons – « le détournement d’un droit d’aînesse : archives du procès Ruben /Juda », ou « Les problèmes d’organisation dans un foyer polygames, d’après une lettre inédite de Rachel à Léa », franchement, aurait-il encore eu la possibilité ou même l’envie d’en faire du roman20 ?

35matérialité des savoirssupportinfrastructure numériqueInternetElle cite encore une anecdote trouvée sur Google Books21, raconte qu’elle a assisté à un colloque sur les usages d’Internet à la Société des Gens de Lettres :

espaces savantscirculationréseauce qui me fascinait dans cette généalogie de Moses, c’était l’aspect de réseau, de rhizome, de maillage, et même ma façon de réfléchir en était contaminée. Au lieu de suivre linéairement un individu ou un thème, je le rattachais à tous les autres individus ou thèmes qu’il m’évoquait, je ne pensais que grille, trame, arborescence, entrelacement de nœuds et de liens… Et je me demandais si j’aurais raisonné ainsi quinze ans plus tôt, quand Internet n’avait pas encore à ce point envahi notre vie22.

36Racontant tous les détails de son enquête, qui la fournit en informations, archives et documents, elle finit d’ailleurs par se comparer à une « centrifugeuse23 » :

matérialité des savoirsmatériaupapierJ’ai accumulé 1 kg 975 de documents papier, enregistré 76 onglets, écumé cinq ou six bibliothèques, rempli quatre cahiers A5 de mes hiéroglyphes, massacré six bristols de 65x55cm et deux de 70x55, deux rouleaux de colle fixe, deux rouleaux de colle repositionnable, et un gros feutre qui ne m’appartenait pas24.

37pratiques savantespratique intellectuelledocumentationLes romanciers sont nombreux à puiser à cette mémoire semi-vivace, semi-effacée, disparaissante – apparaissante, faisant surgir de l’oubli des figures qui vont sans aucun doute y replonger. Le spectral a pourtant changé de nature : il n’est plus de l’ordre du fantomatique ou du fantastique foucaldien mais du virtuel. Chez Poe, on s’en souvient, ce sont les limites entre la mort et la vie qui semblent franchies ; le savant devient un fantôme. Chez Meur et tous les écrivains qui se réfèrent à la mémoire d’Internet ou à la documentation qui tiendrait lieu de représentation, l’érudition est spectrale en ce sens qu’elle est virtuelle – ou plus exactement que les limites entre la réalité et la virtualité sont franchies. Le spectre est à présent non pas ce qui bouscule les limites entre la mort et la vie mais une incertitude ontologique sur le degré de réalité – de la mémoire, du savoir, de ce qu’on représente. On serait passé du syndrome Ligeia au syndrome numérique : trop de savoir tue ; trop de mémoire écrase et rend virtuelle la réalité elle-même.

38matérialité des savoirssupportinfrastructure numériqueL’enquête d’une part, et d’autre part la mémoire, sont aujourd’hui massivement hantées par le spectre du numérique, qui fait de toute invention une reconstitution textuelle – un assemblage de signes de la réalité – c’est-à-dire un prélèvement sur le Web. À défaut du terrain, de l’observation, de la documentation, on constitue la représentation à partir des données trouvées sur le Net – savoir, anecdote, faits, tableaux chiffrés, cartographie, état civil de personnages, etc.

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40construction des savoirslangage et savoirsgenreromanIl serait illusoire de penser que seul le roman historique est modifié par la disponibilité des savoirs et des mémoires sur le Net : c’est toute la fiction qui s’en trouve changée, puisque tout peut être vérifié, retrouvé, développé, romancé. Pour finir, c’est le rapport au réel lui-même qui est filtré, voire infiltré, par ce qui en est consigné sur le Net. La réalité devient spectrale.

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42Le second point qui mérite d’être noté est la manière dont la modification du rapport au savoir nous a éloignés d’un usage strictement mémoriel de l’érudition, si frappant, par exemple, chez Sebald, pour faire place à un rapport postmoderne – en ce sens que ce sont les limites entre le réel et le virtuel, le vrai et le faux, qui sont remises en cause. L’érudition n’est plus de qui est sollicité pour reconstituer ce que l’on croit ou sait avoir perdu, mais un déchaînement de références savantes, éparpillées, disparates, déhiérarchisées, et souvent coupées de la quête du passé comme de celle de la vérité.

43La nature de l’érudition s’en trouve elle-même modifiée : où se situe-t-elle ? Dans la note rare d’un document rare repéré sur le Net ? Dans l’investissement d’une archive retrouvée par ce biais ? Dans le statut marginal de ce savoir ? Dans son devenir spectral, exhumé de la mémoire impersonnelle et disponible partout et toujours ? Le fragment du passé devenu présent retourne dans les limbes d’une mémoire numérique sans corps et sans épaisseur.

44pratiques savantespratique intellectuelledocumentation espaces savantslieuarchives pratiques savantespratique lettréecitationL’érudition est triplement changée : d’abord parce que le rapport au texte est modifié (sa disponibilité, dans une sorte de mémoire externe et réticulaire, développe de nouveaux usages de la citation) ; ensuite parce que le document est transformé en archive et les archives sont elles-mêmes disponibles alors qu’elles étaient secrètes et cachées ; enfin parce que la hiérarchisation entre le texte et le document est bouleversée.

45construction des savoirsépistémologieméthode typologie des savoirsdisciplinesdivisions historiques des savoirshumanismeSi l’on en revient à mon point de départ, à savoir que l’érudition, humaniste ou fantastique, est une méthode de connaissance fondée sur un rapport au texte et au commentaire, devenant une forme de survie, ou orientée vers la transmission, il n’est donc pas étonnant de constater qu’aujourd’hui, quel que soit son discrédit théorique, elle perdure, en particulier dans la fiction. Elle y perdure parce qu’elle hante l’imaginaire. Cette hantise procède d’un rapport au texte bouleversé (toute la réalité sociale est texte), et d’un rapport à la mémoire angoissé, angoissé d’abord par les modifications des possibilités d’oubli. L’érudition est ce qui fait fermenter l’imagination parce qu’on y articule mémoire personnelle et impersonnelle et parce qu’on y noue à nouveaux frais la possibilité de représenter le présent ou le passé, sans que le partage entre ce qui est commun et rare, ce qui est actuel et obsolète, soit clairement défini.

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47Pour conclure je soulignerai donc que l’écriture de la fiction et de l’histoire reste tributaire de l’érudition, réinvestie par la fiction, déplacée par le numérique. Parce que le savoir, entre histoire et mémoire, est disponible, outillé par des moteurs de recherche qui sondent les prothèses que sont les mémoires-bases de données numériques, la réalité, sans cesse diffractée dans une myriade de représentations, devient spectrale. Ce n’est plus le savoir qui, par trop de proximité avec le passé, fait de vous un spectre, c’est la réalité elle-même qui est virtualisée. Le spectre de l’érudition : l’érudition du passé qui nous hante, un nouveau rapport à la mémoire et l’histoire qui rend spectrale la réalité. Après un régime humaniste, fondé sur la transmission, un régime fantastique, misant sur l’effroi que produit le savoir, nous avons connu un régime mémoriel – l’érudition est ce qui permet de retrouver ou de conjurer les traces d’un passé qui souvent les a effacées. Ce régime était souvent mélancolique, non pas au sens où le savoir fragilise la frontière entre la mort et la vie et finit par prendre celle-ci, par tuer, mais parce que la mémoire écrase. Aujourd’hui, un régime numérique ou post-moderne apparaît : le savoir ou les traces de mémoire sont déconnectés du savoir commun, de la tradition et de la transmission, des partages entre régime authentique et régime apocryphe ; ils sont moins écrasés par la mémoire du passé qu’excités par le jeu que rend possible la disponibilité soi-disant constante de tout ce qui a été écrit ou enregistré de la réalité – la réalité devenant elle-même la somme de ces traces ou de ces représentations.

Notes
1.

Foucault, 2001.

2.

Schlanger, 2008.

3.

Piégay-Gros, 2008.

4.

Hugo, 1985.

5.

Nietzsche, 1950, p. 334-335.

6.

Poe, 2004, p. 327-328.

7.

Poe, 2004, p. 324-325.

8.

Starobinski, 1982.

9.

Sebald, 2002.

10.

Derrida, 1995, p. 37.

11.

Canetti, 1991.

12.

Michon, 2007, p. 109.

13.

Michon, 2002.

14.

Sebald, 1999, p. 352.

15.

Piégay, 2014.

16.

Senges, 2007, p. 222-224. Voir aussi Senges , 2012.

17.

De Certeau, 1975, p. 85-86.

18.

Meur, 2015.

19.

Meur, 2015, p. 154.

20.

Meur, 2015, p. 155.

21.

Meur, 2015, p. 174.

22.

Meur, 2015, p. 188.

23.

Meur, 2015, p. 344.

24.

Meur, 2015, p. 455.

Appendix A Bibliographie

  1. Breton, 1949 : André Breton, « Flagrant délit », La Clé des champs, Paris, Le livre de poche.
  2. Canetti, 1991 : Élias Canetti, Auto da-fé, Paris, Gallimard.
  3. De Certeau, 1975 : Michel de Certeau, L’Écriture de l’histoire, Paris, Gallimard.
  4. Derrida, 1995 : Jacques Derrida, Mal d’archive, Paris, Galilé.
  5. Foucault, 2001 : Michel Foucault, « La Bibliothèque fantastique », Dits et écrits, 1954-1988, Paris, Gallimard.
  6. Hugo, 1985 : Victor Hugo, Poésie, III, Paris, Robert Laffont.
  7. Lyotard, 1979 : Jean-François Lyotard, La Condition post-moderne, Paris, Minuit.
  8. Meur, 2015 : Diane Meur,La carte des Mendelssohn, Paris, Sabine Wespieser.
  9. Michon, 2007 : Pierre Michon, Le Roi vient quand il veut, Propos sur la littérature, Paris, Albin Michel.
  10. Michon, 2002 : Pierre Michon, Abbés, Paris, Verdier.
  11. Piégay-Gros, 2009 : Nathalie Piégay-Gros, L’Érudition imaginaire, Genève, Droz.
  12. Piégay-Gros, 2013 : Nathalie Piégay-Gros, « Pierre Michon et l’érudition », dans Pierre-Marc de Biasi, Agnès Castiglione et Dominique Viart (dir.), Pierre Michon, l’écriture et son ombre, « Les cahiers de la NRF », Paris, Gallimard, p. 340-350.
  13. Piégay-Gros, 2014 : Nathalie Piégay-Gros, « Les lieux de l'érudition », dans Agnès Cousin de Ravel, Chantal Lapeyre-Desmaison et Dominique Rabaté (dir.), Les Lieux de Pascal Quignard, « Les cahiers de la NRF », Paris, Gallimard, p. 233-245.

  14. Nietzsche, 1950 : Fr. Nietzsche, Le gai savoir, Paris, Gallimard.
  15. Poe, 2004 : Edgar Poe, Histoires extraordinaires, Paris, Gallimard.
  16. Roubaud, 2018 : Jacques Roubaud, Peut-être ou la nuit de dimanche. (brouillon de prose) autobiographie romanesque, Paris, Le Seuil.
  17. Schlanger, 2008 : Judith Schlanger, La Mémoire des œuvres, Paris, Verdier.
  18. Sebald, 1999 : W. G. Sebald, Les Anneaux de Saturne, Paris, Gallimard.
  19. Sebald, 2002 : W. G. Sebald, Austerlitz, Arles, Actes sud.
  20. Senges, 2007 : Pierre Senges , La Réfutation majeure, Paris, Gallimard.
  21. Senges, 2012 : Pierre Senges, Fragments de Lichtenberg, Paris, Verticales.
  22. Starobinski, 1982 : Jean Starobinski, « L’immortalité mélancolique », Le Temps de la réflexion, III, p. 231-251, Paris, Gallimard.